Chroniques

La perte d’un ami vrai

Photo Denis Gauthier

Par Denis Gauthier

Chroniques

13 décembre 2023

Crédit photo : T R A V E L E R G E E K / Unsplash

Un ami sincère ne fait pas disparaître nos problèmes ; plutôt, il ne disparaît pas quand nous avons des problèmes. C’est ce que j’ai vécu avec mon ami Pierre. Il n’est donc pas facile émotivement de perdre une telle solidarité, brisure d’un authentique canal de joie et d’espérance.

Intellectuellement, lui et moi, nous essayions de suivre les chemins de quelques prédécesseurs, comme le philosophe Spinoza de religion juive, le psychologue Carl Jung de religion protestante ainsi que bien d’autres personnes aussi inspirantes.

Nous cherchions à structurer, à encadrer une spiritualité multiculturelle, humainement universelle, mais pré-théologique. Nous tendions vers une méthode qui ne se définissait pas par une série de règles devant être suivies par un esprit lourdaud, mais par un cadre qui pourrait favoriser la collaboration créatrice entre tous les humains sans exception. Notre but était d’avoir un modèle de spiritualité de libération qui nous amènerait éventuellement vers un certain Oméga universel, tel que conçu par Pierre Theilhard de Chardin[1].

Pierre et moi, jamais nous ne signions des textes conjointement[2] sans les avoir au préalable ressentis, expérimentés et les avoir faits nôtres. Quelle force intérieure se dégageait de nos rencontres!

«Sans ami, disait Aristote, personne ne choisirait de vivre». Que notre amitié naisse comme un coup de foudre ou qu’elle s’épanouisse au fil du temps, elle nous construit toujours, et nous transforme malgré tout. Mystérieux et plein de paradoxes, ce lien fortifiait notre âme, notre esprit. Même si, parfois, nos esprits divergeaient, nous nous respections et nous terminions toujours nos textes en accord. Nous demeurions toujours, pour l’un et l’autre, un phare très éclairé au milieu des tempêtes de nos vies.

Il continue, certainement, à m’éclairer, même au-delà de la mort.

Nous cherchions, avec le plus grand discernement et le plus honnêtement possible, à résoudre la complexité de notre âme, de notre vie. Plus nous avancions dans nos réflexions, plus nous constations que notre corps, avec l’aide de la science, grandissait constamment en espérance de vie. Par le fruit de nos expériences, nous remarquions que notre âme semblait plutôt décroître pour devenir des petites étincelles provenant d’une magnifique étoile du firmament de notre Univers.

Dans le contexte d’un monde bouleversé, de plus en plus institutionnalisé, en quête de sens et de nouveaux repères qui ne viendraient que de l’extérieur plutôt que de l’intérieur, nous avions trouvé une raison majeure de réfléchir sur la quintessence de notre identité réelle, ce dont nous n’avons cessé de faire, Pierre et moi.

La mort, pour nous, était comme une fin du monde et la fin de cette humanité qui réside en nous tous sans exception. En effet, par nos gênes, nous montrons que nous sommes un résumé de l’histoire humaine et le fruit d’un immense brassage d’idées.

Or, la perte de mon cosignataire et ami Pierre Brûlé représente une grande partie de l’humanité qui est transportée dans une autre dimension ; c’est le cosmos tout entier qui se trouve ailleurs.

Cependant, si la «confiance» dit vrai et surtout si la «raison» l’approuve, cet «ailleurs» est un endroit sans espace, sans temps et qui donne ainsi accès au défunt à l’humanité entière, du début à sa fin.

Finalement, mon grand ami Pierre réalise, comprend, confirme et accepte actuellement ce que l’Humain avait à lui dire. De cet «ailleurs» où il réside maintenant, il a la chance de vivre éternellement cette joie et cette paix si désirées ici-bas.

Éclaire-nous à ton tour, mon cher ami Pierre, s’il vous plaît.

Ton ami éternel,

Denis

 

Notes :

 

[1] Le point Oméga représente le point ultime du développement de la complexité et de la conscience vers lequel se dirige l’Univers. (Source : Wikipédia)

[2] Ils ont co-écrit le livre Se voir autrement. La conscience et son pouvoir (disponible en librairie et à la Fondation Père-Ménard, ainsi que des chroniques dans ce blogue comme « Une vie après la vie », « Idéalisme et réalisme » et « La valeur de la différence », entre autres.

 

À PROPOS DE DENIS GAUTHIER

Homme d’affaires, ex-jésuite et de descendance amérindienne, héritage dont il est particulièrement fier, Denis est un univers en soi. Un univers qu’il arpente patiemment et résolument, y semant projets mobilisateurs et fidèles amitiés. Amoureux de la nature, passionné par les humains, il sait convaincre et excelle dans l’art de s’entourer de personnes motivées et créatives qui sauront l’épauler et le suivre.

 

Les opinions exprimées dans les textes sont celles des auteurs. Elles ne prétendent pas refléter les opinions de la Fondation Père-Ménard. Tous les textes publiés sont protégés par le droit d’auteur.

 

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